L’envie m’est venue d’écrire cet article en réponse à ce que j’observe autour de moi, en réponse aux questions que l’on me pose souvent.
L’objectif de cet article se veut avant tout de permettre à une personne n’ayant aucune connaissance martiale de faire murir sa réflexion, de poser un choix éclairé sur sa pratique martiale.
Une question que l’on me pose régulièrement est de savoir s’il est possible d’être efficace rapidement et combien de temps cela va prendre?
La réponse est simple et compliquée à la fois mais ce qui est certain, c’est qu’il est impossible d’être efficace martialement ou dans une situation réelle de self-défense, combat ou autre, rapidement. Je dirai même fuyez toute personne qui vous promet cela. Cette démarche n’est pas honnête et ne fait que répondre à une demande « marketing », un phénomène de société du « tout, tout de suite ». Mais alors combien de temps? Cela dépend de plusieurs choses: le pratiquant d’abord, tout le monde n’a en effet pas les mêmes capacités, certaines personnes sont douées pour la musique, les langues et bien pour les arts-martiaux, c’est pareil. Ensuite, la qualité de l’enseignant est primordiale, j’y reviendrai plus tard. Et puis l’assiduité, l’investissement en temps et l’état d’esprit auront un impact réel. Certaine personne passe leur ceinture noire après 5 ans, d’autres 20 ans, d’autres jamais. Il est difficile de trouver un bon professeur et encore plus difficile de trouver de bons élèves.
Méfiez-vous donc de la poudre que l’on vous jette aux yeux, ce n’est qu’une illusion, celle-ci se dissipera bien vite en situation réelle!
Ce n’est qu’à travers une pratique assidue et sincère que le corps peut intégrer les principes de l’art enseigné, que le corps lui-même se modifie dans sa structure. C’est cela le prix de l’efficacité martiale.
Les arts-martiaux traditionnels sont-ils efficaces en situations réelles?
Je pense avoir répondu en partie à cette question en début d’article mais une réponse simple est oui, évidemment. Les arts-martiaux traditionnels ont cette particularité, je pense, de polir le pratiquant comme le forgeron poli le sabre jusqu’à lui donner son tranchant. C’est bien cela qui se joue dans l’étude des Kata que l’on retrouve dans les écoles traditionnelles. C’est cela qui donne du corps au pratiquant. Evidemment, si vous voyez les Kata comme des applications de self-défense, cela peut sembler inadapté pour notre époque à toute personne qui n’y serait pas initié. Le but des Kata n’est donc pas de reproduire des situations de self-défense. Le but premier est à mon sens de permettre l’apprentissage des principes de l’école et la transmission de cette école.
Dans l’école que j’enseigne, le nombre de techniques du Kata Shodan sont peu nombreuses par exemple; pourtant, il y a du travail pour des années. Il n’est pas utile de mettre des centaines de techniques pour un grade, au contraire cela est même préjudiciable. Evidemment, entrer en profondeur dans les techniques demande une connaissance et une compréhension approfondie de l’enseignant. Si vous avez une connaissance superficielle, vous serez tenté de rajouter des techniques ou variantes pour combler vos lacunes. Si je vous demande par exemple de parler devant un public pendant une heure, il vous faudra bien maîtriser votre sujet si vous ne parlez que d’un sujet mais si vous ne maîtrisez pas votre sujet, cela est bien plus confortable alors d’aborder tous les sujets qui vous viendraient en tête afin de tenir le temps demandé.
En conclusion, les arts-martiaux traditionnels ont peut-être cette honnêteté anti-marketing dont certains abusent de ne pas promettre une efficacité absolue ou des techniques de combat adaptées à la rue, le tout en un temps record. A croire que jadis, les guerriers japonais ne savaient pas se battre, eux pour qui le quotidien était la guerre, et dont la technique dépendait la vie ou la mort. A moins que ce ne soit l’inverse? Et si au contraire, parce que nos vies ne sont plus menacées de la même manière qu’à l’époque, on pouvait se permettre ce genre d’illusions commerciales.
Quel grade doit avoir un bon professeur?
Avant tout, il est important de dire ou de rappeler qu’il n’y a en Belgique aucune règle, loi à ce sujet. Cela veut dire que n’importe qui peut se prétendre 10ème Dan s’il le souhaite.
Cela est en revanche un peu moins vrai pour certaines fédérations. Par exemple, en Aïkido si l’on regarde l’Aikikai, ne sera pas 8ème Dan Aïkikai qui veut puisqu’il y aura un contrôle de cette fédération, mais encore une fois, cela n’est toujours pas une assurance de qualité. Cela pose donc la question sur la manière dont les grades sont donnés dans certaines fédérations, mais cela est un autre sujet. Par contre, rien n’empêche de créer sa propre fédération, et de s’auto-proclamer 8ème Dan…
Attention donc à cette attrape marketing…
En ce qui me concerne, j’ai crée mon école il y a quelques années, j’en suis donc le fondateur et cela n’aurait aucun sens de m’autoproclamer 6ème ou 8ème Dan. Cela me semblerait juste malhonnête ou à visée commerciale. L’étude de l’école que j’ai pratiquée dans le passé m’a amené à avoir un grade dans cette école, cela fait partie de mon parcours martiale et ne s’applique qu’à cette école-là, cela ne serait pas honnête de faire des transpositions dans une autre école.
En conclusion, voici quelques éléments à tenir en compte dans le choix de votre enseignant:
Auprès de qui a t-il étudié? Quel est son parcours?
Faut-il utiliser la force pour que les techniques passent? Si oui, cela montre un manque de compétence. Demandez à tester (avec respect bien évidemment). Par exemple sur une saisie en tenant fermement.
Peut-il exécuter les techniques au ralenti sans que pour autant vous puissiez résister et sans qu’il utilise la force?
Les techniques sont-elles tributaires de coups donnés au préalable? Si oui, cela peut révéler un manque de connaissance technique…
Est-il capable d’expliquer chaque mouvement effectué dans une technique? Le sens de chaque geste.
Le mot de la fin…
Il est je pense important de se poser les bonnes questions, de tester différents dojo ou club sportif, de poser des questions. Choisir une école ou une Ryu, ne doit pas se faire à la légère car celle-ci vous transforme positivement ou négativement. J’ai souvenir d’un pratiquant arrivé dans mon dojo, celui-ci pratiquait une autre discipline dans laquelle il avait un niveau élevé. Pourtant, de ce pratiquant transpirait la peur, l’appréhension de la douleur l’empêchait même une pratique correcte. Ces stigmates d’une pratique passée inadaptée peuvent mettre beaucoup de temps à disparaître car le corps a lui aussi sa mémoire, une pratique inapproprié peut réellement causer des dommages… Non, il n’est pas normal de sortir blessé régulièrement après un cours. La pratique martiale doit renforcer, forger le pratiquant et non l’éroder que cela soit au niveau physique ou mentale.
Bonne réflexion !